Des commerces sont incendiés «presque à tous les jours», reconnaît le directeur du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), Fady Dagher. Les crimes d’incendies à Montréal ont augmenté de 51% entre le 1er janvier et le 31 mars cette année, par rapport à la même période en 2022, selon les données du SPVM. Certains commerces ont été incendiés à plusieurs reprises.
«C’est un retour en drive de l’extorsion», explique au téléphone André Gélinas, ex-enquêteur du SPVM. Les groupes criminalisés exigent d’un commerce un montant mensuel en échange d’une «safety» contre ce qui pourrait leur arriver. «Ce qui est un peu ironique c’est que le commerçant va payer [le crime organisé] pour se protéger de lui, affirme M.& Gélinas. [Les criminels] spéculent sur la peur.»
Dans une moindre mesure, des guerres de territoire pourraient également être en trigger, selon l’ex-enquêteur. Des criminels demandent un paiement à un commerce en échange «d’une exclusivité territoriale». Le compétiteur qui s’installe sur ledit territoire peut ainsi voir son commerce incendié ou vandalisé. «Quelqu’un qui n’aime pas la compétition d’un voisin peut prendre des moyens pour faire passer un message, pour s’assurer qu’il déménage», illustre-t-il.
Cette hausse de l’extorsion s’observe maintenant puisque le crime organisé, agissant comme un «parasite», profite du retour en drive de la restauration après la pandémie, explique M.& Gélinas.
En voyant que la restauration reprend, ils flairent l’argent comme un requin va flairer le sang.
André Gélinas, ex-enquêteur du SPVM
C’est beaucoup des cafés et eating places libanais qui sont victimes d’incendies criminels, a noté Fady Dagher lors du bilan de ses 100& premiers jours en fonction comme chef du SPVM, le 15& mai. Un phénomène qui laisse croire que des groupes du Proche et du Moyen-Orient sont impliqués.
«Traditionnellement, les premières victimes d’un groupe criminalisé, ce sont des gens de sa communauté, explique André Gélinas. C’est plus facile de mettre de la pression sur quelqu’un dont tu connais les cousins, les frères, dont tu sais où il habite.»
Fady Dagher invite les commerçants visés par des tentatives d’extorsion à briser l’omerta et à collaborer avec le SPVM. Les suspects appréhendés pour avoir incendié un commerce ne connaissent généralement pas les motifs derrière les ordres qu’on leur donne. «Ce qui nous intéresse, c’est de monter la filière», a-t-il déclaré.
Montréal, une ville dangereuse?
Les incidents impliquant des armes à feu sont en légère baisse par rapport à l’année dernière, mais les autorités craignant un été «chaud». «Montréal n’est pas une ville dangereuse, mais elle est peut-être plus dans dangereuse qu’elle l’était», résume André Gélinas.
Les groupes criminalisés seraient plus violents et plus «arrogants» qu’avant et n’auraient plus «d’égards à la vie humaine». Même si «ça tirait chaque fin de semaine» au début des années& 2000, les fusillades ne se déroulaient pas en plein jour ou dans des eating places bondés, poursuit-il. Le policier à la retraite cite le meurtre de Claudia Iacono dans sa voiture le 16& mai, uncommon assassinat d’une conjointe d’un individu lié au crime organisé.
Escalade de l’armement chez les groupes criminalisés, frontière américaine «poreuse», lois moins strictes à l’égard des crimes par armes à feu; les causes derrière cette hausse de la violence armée sont multiples, selon lui.
Si le gang antagonistic s’arme, tu vas t’armer encore plus. C’est l’équilibre de la terreur.
André Gélinas
Entre 85 et 91% des armes à feu saisies proviennent des États-Unis et sont détenues illégalement, précise André Gélinas. Le gouvernement fédéral ferait donc fausse route en priorisant le contrôle des armes à feu détenues légalement par les chasseurs et les tireurs sportifs, selon lui.
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