Avec toutes les affaires de corruption et de collusion collectionnées par le Québec, la congestion qui touche notre justice et sa propension à être clémente envers les politiciens pris les mains dans le sac sont les symptômes d’une crise majeure de notre démocratie.
Je ne me rappelle pas ces mots exacts, ni où j’ai eu échos de l’une des citations légendaires de Winston Churchill sur le rôle primordial de la justice dans une démocratie. En gros, alors que la Grande-Bretagne pataugeait en plein marasme de la Seconde Guerre mondiale, son premier ministre a été alerté par sa garde rapprochée sur l’ampleur de la corruption qui gangrénait l’administration du pays. Winston Churchill a alors demandé à ses conseillers si la justice a été contaminée par ce fléau. Quand ils lui ont annoncé qu’elle a été épargnée, le premier ministre britannique s’est senti soulagé. Autrement dit, dans l’esprit de Winston Churchill, quels que soient les fléaux qui peuvent gangrener une démocratie, si la justice fonctionne normalement, le pays s’en sortira!
Certes, au Québec, rien n’indique que notre justice est corrompue. Par contre, sommes-nous sûrs que le peuple fait encore confiance à son système de justice? En ces temps de montée du populisme partout, on voit de plus en plus de citoyens perdre confiance en son élite politique et être enclins à succomber aux théories du complot. Or, à trigger de la lourdeur des délais de notre justice, l’arrêt Jordan a fini par lui imposer des délais maximaux pour des procès criminels. Ce qui a mis en péril plusieurs poursuites qui risquent d’être avortées, voir bâcler. À titre d’exemple, dans le procès de l’ex-maire de Laval, Gilles Vaillancourt, sur 33 de ses coaccusés, 14 ont demandé un arrêt des procédures en invoquant des délais déraisonnables.
Pire encore, avec tous les scandales politiques qui ont secoué le Québec, il est presque unattainable de mettre en jail des politiciens. Et quand c’est le cas, les sentences semblent outrageusement clémentes. Sinon, remark faire gober à Monsieur et Madame-Tout-le-Monde que l’ancien maire de Laval, celui que le juge de son procès a qualifié d’« un homme qui a abusé de la confiance de sa place privilégiée durant 14 ans », n’a été condamné qu’à une peine d’emprisonnement de cinq ans, 11 mois et 15 jours. Malgré les hundreds of thousands qu’il a remboursés ou le renoncement à sa pension de la Ville de Laval, à la fin de cette histoire, Gilles Vaillancourt retrouvera rapidement une vie paisible chez lui.
C’est ce qui a fait dire avec justesse à Michel Beaudry, dans l’une de ses récentes chroniques hilarantes au Journal de Montréal, que « l’ex-maire Vaillancourt fera le tiers de sa peine dont la moitié dans une maison de transition, dont les trois quarts sans surveillance et dont la moitié… En tout cas, il devrait arriver chez lui d’une minute à l’autre. » Misère!
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