MONTRÉAL — L’Institut neurologique de Montréal s’attaque à une problématique fort complexe en lançant un portail en santé mentale multilingue qui s’adresse tant aux communautés culturelles qu’aux praticiens du domaine de la santé mentale.
Les specialists soulignent qu’au-delà des barrières linguistiques, la santé mentale est perçue différemment selon les cultures, des différences qui changent à la fois l’approche et la manière d’aborder la problématique.
«Dès ma première psychose, ma crise, j’ai eu le mauvais réflexe de chercher celui qui m’aurait lancé un mauvais type», a confié mercredi en conférence de presse à Montréal l’humoriste Michel Mpambara.
Michel Mpambara, qui est porte-parole de la campagne «Bell trigger pour la trigger», souffre de hassle bipolaire et il a raconté sa propre expérience d’immigrant originaire du Burundi aux prises avec une maladie mentale.
«Au lieu de consulter un spécialiste dans le domaine, j’ai plutôt téléphoné au village pour consulter le sorcier de famille. Ça m’a coûté bien plus cher que le psychiatre!»
«Il y a un immigrant qui pensait que (d’être bipolaire), c’était un métier. Il m’a demandé combien je gagnais par année, dans quoi j’avais étudié pour devenir bipolaire!», a-t-il ajouté en riant.
La présence de l’humoriste n’était pas le fruit du hasard: la conférence de presse avait été convoquée pour annoncer que l’initiative a reçu un coup de pouce de taille, soit un octroi de 250 000 $ de la campagne «Bell trigger pour la trigger» pour soutenir le développement de ce projet.
Le portail net, appelé le Centre de ressources multiculturelles en santé mentale (CRMSM), offre des providers en cinq langues, dont l’arabe et le mandarin, mais compte étendre l’effort à une centaine de langues.
Au-delà de l’anecdotique, la problématique peut s’avérer fort complexe pour les professionnels de la santé.
La présidente de l’Ordre des psychologues du Québec, Christine Grou, a noté jusqu’à quel level il est facile de se faire déjouer par des biais culturels.
«J’ai déjà fait une évaluation d’une dame dont je croyais qu’elle avait un délire paranoïde; elle était méfiante par rapport à plein de monde et j’avais l’impression que c’était délirant, mais j’ai fini par apprendre qu’elle avait une croyance religieuse et une tradition qui justifiait son état. Ce n’était pas du délire», a-t-elle raconté.
Certaines cultures ont également des interdits et des tabous sociaux qui peuvent être trompeurs, a précisé la docteure Grou.
«Par exemple: l’évitement du contact visuel en santé mentale, c’est un symptôme — pas le seul, mais un symptôme quand même — qu’on retrouve par exemple chez les troubles de la lignée psychotique ou encore les troubles de la lignée autistique, mais il y a des cultures, en Asie notamment, où le fait de regarder dans les yeux quelqu’un qui est en place d’autorité, c’est impoli.»
Le CRMSM fournit notamment aux personnes points des communautés culturelles, immigrantes ou réfugiées une foule de renseignements, notamment sur les ressources disponibles et la manière d’y accéder et toutes sortes de références et factors de repère aux professionnels de la santé mentale qui sont appelés à intervenir auprès de cette clientèle.
Puisqu’il s’agit d’une ressource en ligne, elle sera utile à l’échelle canadienne et il ne faudrait pas se surprendre d’y voir naviguer des personnes intéressées de l’extérieur du pays.
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